Dehors, les oiseaux – Louis Monnet
Quand la mer souillée a craint pour son sel
Que le sable et le vent étendent le Sahel
Et des navires perdus errent parmi les astres.
Quand la raison violée voue la Terre au désastre
Que des enfants ont faim et qu’on brûle le blé
Et des prisons regorgent de liberté troublée.
Quand souvent les nuées se transforment en déluges
Que du mal et du bien l’homme serait le seul juge
Pour maintenir l’espoir dans ces heures méchantes
Buvant le bleu du ciel, dehors, les oiseaux chantent.
Si le cœur est saignant, si la tendresse est morte
Si l’espoir s’est enfui, la tentation trop forte
De se laisser aller, seul au fil du courant,
La volonté absente et abdiquant son rang,
Si l’horizon est noir, l’espérance perdue,
Si la vie te réclame deux fois plus que son dû,
Si même tu ne crois plus, si alors tu blasphèmes,
Et tu voudrais mourir en pleurant sur toi-même,
Comme de purs joyaux que la lumière enchante
Dans un hymne au soleil, dehors, les oiseaux chantent.
Quand tu es prés de moi, que je suis prés de toi,
Que notre ciel de lit nous couvre comme un toit
Et nos doigts emmêlés sont le plus doux des liens,
Quand tout n’est plus que nous, et le tien et le mien,
Que même les yeux fermés je vois briller tes yeux
Et ça fait presque mal tellement c’est merveilleux,
Que c’est bien peu payer cet immense bonheur,
De le vivre si peu, ne serait-ce qu’une heure,
Avec toute cette joie donnée et consentante
Et que, rien que pour nous, dehors, les oiseaux chantent.
Louis Monnet
Extrait du recueil Caravanes