Pour attendre l’heure
C’est sûr, les temps sont fous et c’est chacun pour soi.
On fait taire ses ennuis comme on garde ses joies.
Le partage se fait rare, on est seul sur la terre,
Parfois on voudrait bien, on ne sait comment faire.
Et c’est ainsi qu’on va, sans doute par habitude,
On serre un peu les dents lorsque la vie est rude,
Quand le vent est au beau on y goûte en avare.
C’est déjà bien assez que ces temps-là soient rares.
Il faut voir les plus jeunes qui se croient initiés,
Qui se grisent de bruits et de fausses amitiés,
Entrainés de bon gré dans la ronde galopante
De plaisirs falsifiés qui, à peine, les contentent.
Mais il y a aussi tous les laissés pour compte
D’une société d’exclus et qui ont un peu honte
D’être écartés de tout, du travail, de l’argent.
Pour eux, tendre la main est certes outrageant.
Et je songe aux ainés et à toutes ces vieilles
Qui ont le cœur trop grand, qui dans leurs soirs de veille
Espèrent de demain quelque peu de tiédeur
Plus précieuse que le pain pour attendre l’heure.
Louis Monnet